19/03/2003 Texte

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« Si les Américains échouent, ce sera le chaos »

Après l'ultimatum lancé par George Bush au président Irakien, les pays arabes ont réagi timidement

Antoine Basbous. « Les dirigeants des pays arabes sont très gênés par l'évolution de la situation en Irak. C'est avec un grand soulagement qu'ils vont accueillir le début de l'offensive américaine contre l'Irak. Et ils seront encore plus soulagés si la guerre ne s'enlise pas. Au moins quinze des vingt-deux pays de la Ligue arabe ont prêté main forte aux Américains dans la guerre qu'ils préparent contre l'Irak. De tous les pays arabes, seule la Syrie est réellement préoccupée. Les dirigeants syriens voient d'un très mauvais oeil le stationnement de l'armée américaine à leur frontière-est. Ils redoutent que Washington leur demande des comptes sur la mort, en 1983, de plus 300 soldats et diplomates américains au Liban. Les dirigeants syriens qui avaient coordonné les attentats anti-américains sont toujours au pouvoir ».

D'importants dommages collatéraux pourraient-ils provoquer des soulèvements populaires ?

« Vous évoquez un soulèvement des populations arabes. Mais la rue arabe ne s'est pas mobilisée pour dénoncer la volonté américaine d'attaquer l'Irak D'abord, Saddam Hussein n'est pas très aimé par les populations arabes. Ces dernières refusent de soutenir un tyran qui veut gouverner son peuple à vie, pour être ensuite remplacé par son fils. Je pense, que dans leur grande majorité, les Arabes aspirent à la liberté. Ensuite, il ne faut pas oublier que qu'on ne manifeste pas facilement dans ces pays, faute d'autorisations. En revanche, en cas d'enlisement, la rue arabe risque de réagir violemment ».

Vous avez parlé des risques pour la Syrie, qu'en est-il de l'Arabie saoudite ?

« La principale crainte des Saoudiens concerne le pétrole. Ils ne souhaitent pas voir les deuxièmes réserves mondiales de pétrole mises en exploitation. Car, avec ses réserves, l'Irak pourra se substituer de façon sérieuse à l'Arabie Saoudite et libérer le monde de la dépendance énergétique à laquelle il est soumis par les Saoudiens. L'autre crainte des Saoudiens concerne une éventuelle démocratisation de l'Irak. Ce qui obligera Riyad à revoir ses relations avec ses wahhabites. Dans le cas contraire, la famille royale risque une déroute et le pays un démembrement qui va dissocier les pétrodollars du wahhabisme qui exporte et finance sa doctrine à travers le monde ».

Comment voyez-vous l'après-guerre ?

« Tout va dépendre du déroulement de la guerre. Mais si les plans américains réussissent, je pense qu'on ira vers des changements radicaux dans les pays arabes. Aider les arabes à chasser les dictateurs serait déjà un grand pas vers la progrès et la prospérité dans cette région. Les Arabes pourront alors espoir, rester chez eux pour construire leurs pays et préparer l'avenir de leurs enfants. Si les Américains échouent dans leur entreprise, ce sera un indescriptible chaos ».

OBSERVATOIRE DES PAYS ARABES
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