16/04/2014 Texte

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Elections algériennes: la marge de manoeuvre d'Ali Benflis

Les Algériens doivent élire jeudi leur président lors d'un scrutin placé sous haute surveillance et pour lequel le sortant Abdelaziz Bouteflika apparaît comme le favori face à Ali Benflis qui a multiplié les mises en garde contre la fraude.

Et c'était Ali Benflis? Et si Abdelaziz Bouteflika, président sortant algérien, à l'état de santé préoccupant, laissait la place après 15 ans au pouvoir? Le scénario paraît peu probable alors que les Algériens doivent élire jeudi leur président.

Traditionnellement, "les dirigeants en place fixent, quelques semaines avant les élections, le pourcentage de leur succès à venir", ironise Antoine Basbous, politologue et directeur de l'Observatoire des Pays Arabes, auteur du Tsunami arabe.

Mais si tout paraît verrouillé et donc joué d'avance, quelle est la marge de manoeuvre des opposants au pouvoir? Une donnée d'abord: la cote de popularité d'Ali Benflis, le principal opposant, est en constante progression alors que "la désaffection pour Bouteflika" ne cesse de croître dans un pays où "75% de la population a moins de 25 ans".

Bouteflika face aux divisions de son camp

Outre son état de santé et sa difficulté à s'exprimer, à se mouvoir, le président Bouteflika est également confronté à des divisions dans son propre camp, tant du côté de l'armée que de celui du Front de Libération Nationale (FLN), le parti au pouvoir.

"Cette fois-ci, l'appareil d'Etat est divisé, ce qui donne quelque chance à la transparence des urnes. Infime, tant Bouteflika ait tout fait pour verrouiller le scrutin en nommant les ministres de l'Intérieur, de la Justice, en ayant le Conseil constitutionnel à sa main", explique Antoine Basbous. "Le système a implosé de l'intérieur, car ses deux piliers, l'armée et le FLN se sont divisés. Le FLN a vécu des coups d'Etat permanent, l'actuelle direction est largement contestée, artificielle, elle n'est pas légitime", ajoute-t-il.

Ali Benflis, un homme "sans casseroles"

Si cette élection a des chances, de ne pas être "la duplication" des précédentes, c'est aussi à grâce à la personnalité d'Ali Benflis.

L'homme, tour à tour magistrat, avocat, bâtonnier, Premier ministre de Bouteflika de 2000 à 2003, appartient certes au sérail, mais c'est surtout un "réformateur". "En 1988, il avait été le seul membre du comité des Droits de l'homme, qu'il a contribué à créer, à dénoncer publiquement la répression d'Alger, une révolte étudiante réprimée dans le sang et la torture par l'armée. Ce qui lui avait valu d'être nommé ministre de la Justice". Un poste qu'il occupa "jusqu'au moment où il s'est opposé à l'internement administratif d'opposant dans le désert du Sahara".

A la fois dans le système mais voulant le réformer, c'est "quelqu'un qui n'a pas de casseroles, qui est propre, moderne et dont l'histoire l'honore", renchérit Antoine Basbous. "Il a un père et un frère qui sont des martyrs de la révolution, ce qui lui donne beaucoup de légitimité", conclut-il.

La promesse d'une vigilance redoublée pendant le scrutin

Toutes ces qualités, cette probité, cette volonté de réformes, risquent cependant de ne pas peser lourd si la triche électorale les balaye. C'est pourquoi plusieurs précautions vont être prises par le principal rival de Bouteflika qui a déclaré qu'il "n'accepterait pas de résultats faussés et que la fraude ne passera pas".

Ainsi, un "observateur va être envoyé dans chacun des 60.000 bureaux de vote" et "un décompte parallèle" des voix sera effectué. A partir de là, de deux choses l'une: "Soit Benflis se déclare vainqueur si les résultats le prouvent, soit il indique qu'il faut un second tour et s'oppose au ministère de l'Intérieur qui va sans doute proclamer la réélection de Bouteflika".

 

Propos recueillis par David Namias pour bfmtv

OBSERVATOIRE DES PAYS ARABES
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