16/09/2006 Texte

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Les propos de Benoît XVI font craindre une crise plus violente que celle des caricatures

Les propos de Benoît XVI sur l'islam font craindre aux experts du monde arabo-musulman une répétition des manifestations violentes qui avaient suivi la publication, au Danemark, de caricatures du prophète Mahomet."Certains médias arabes ouvrent tous leurs journaux [télévisés] sur ce sujet, ce qui ne peut que susciter des réactions", constate Antoine Basbous, directeur de l'Observatoire des pays arabes. La crainte est que les réactions indignées ne fassent boule de neige dans toute la région. Ainsi, estime Antoine Basbous, l'adoption par le Parlement pakistanais d'une résolution demandant au pape de "retirer ses propos" risque fort de pousser les parlementaires des autres pays arabo-musulmans à voter des motions similaires "pour ne pas être accusés d'être des non-musulmans". "Il y aura une pression, et quand la passion l'emporte sur la raison, les choses peuvent devenir incontrôlables", avertit M. Basbous.

Abdel Monem Aboul Foutouh, un dirigeant des Frères musulmans, principale force d'opposition en Egypte, estime que la réaction sera "extrême". Les "propos du pape portent plus atteinte à l'islam que les caricatures car ils émanent d'un chef représentant des millions de personnes, et non pas d'un journaliste", explique ce dirigeant.

Contrairement à la crise des caricatures, qui, selon M. Aboul Foutouh, avait été alimentée par des gouvernements voulant faire pression sur l'Europe, "la réaction des musulmans aux déclarations du pape sera spontanée et populaire, et pourrait donc être plus extrême".

INQUIÉTUDES À L'APPROCHE DU RAMADAN

"Je ne pense pas que des excuses suffiraient à calmer la colère", estime Emad Gad, un analyste du centre Al-Ahram pour les études stratégiques et politiques. "Si le pape demande pardon, cela sera considéré soit comme insuffisant, soit comme une victoire contre lui, les deux scénarios sont mauvais", dit-il.

Emad Gad affirme que les prêches du vendredi, le jour de repos hebdomadaire pour les musulmans, seront cruciaux. "Ce qui sera dit par les chefs religieux pourra faire pencher la balance dans un sens comme dans l'autre". Un autre problème est l'approche du ramadan, le mois de jeûne sacré dans le monde musulman, qui commencera le 23 ou 24 septembre. "Un tel discours peut être mis à profit par des extrémistes" pour exacerber les sentiments des fidèles, note l'analyste du centre Al-Ahram.

OBSERVATOIRE DES PAYS ARABES
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