17/05/2003 Texte

pays

<< RETOUR

« Ce sera une guerre de longue haleine entre les Saoud et cette mouvance wahhabite »

Al-Qaida bénéficie-t-elle de sympathies dans certains milieux dirigeants en Arabie ?

Jusqu'à mardi, oui. Mais l'élément nouveau, c'est la déclaration solennelle dans laquelle le prince héritier Abdallah a annoncé la guerre contre al-Qaida et ceux qui justifient sa politique. Jusqu'ici, le régime mettait en cause des mafias, des règlements de compte entre Occidentaux, etc. Aujourd'hui, il reconnaît la responsabilité d'éléments authentiquement saoudiens. Ben Laden avait proclamé, en février dernier, qu'il fallait renverser la monarchie dénoncée comme « impie ». Voilà la réplique. Et, si l'on a pu faire état de rivalités au sein de la famille royale, une déclaration comme celle du prince Abdallah a été à l'évidence discutée et avalisée par les autres princes. Ils vont se serrer les coudes. La survie de la monarchie est en jeu. Ce sera une guerre de longue haleine, meurtrière, entre les Saoud et cette mouvance wahhabite authentique où al-Qaida a trouvé des sympathies.

Cela jouera-t-il sur les rapports avec Washington, qui semblait prendre ses distances avec Riyad ?

Oui. C'est une chance pour la famille royale de renouer des liens de confiance avec Washington, qui étaient ébranlés depuis le 11 septembre parce que l'Arabie saoudite n'a pas été très franche dans ses choix. Son engagement, mardi, dans la lutte contre le terrorisme islamiste qui a frappé le 11 septembre et le 10 mai peut changer le climat. Pour sauver la face au régime et lui permettre de réprimer sans que cela n'apparaisse intervenir sur ordre de Washington, les Etats-Unis ont annoncé, il y a deux semaines, le retrait de leurs troupes. Mais les instructeurs américains comme le personnel de maintenance du matériel US sophistiqué resteront sur place. Du reste, un de leur stationnement a été touché, lundi.

Dans ce contexte, Abdallah peut-il être encouragé par Washington à réformer le régime saoudien ?

La priorité sera très clairement à l'éradication de cette forme belliqueuse du wahhabisme. Mais les bénéficiaires s'en trouveront ipso facto parmi les tendances libérales de la société. Ceci dit, la réforme est affaire de longue haleine, et les Saoud n'ont guère le tempérament à partager le pouvoir ou à voir une assemblée discuter dans leur pré carré.

Antoine Basbous vient de publier une nouvelle édition de « l'Arabie saoudite en question » (Fayard, 18 euros).

OBSERVATOIRE DES PAYS ARABES
twitter   |