26/03/2008 Texte

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L'Egypte veut garder la tête de la "famille nucléaire" arabe

LE CAIRE (AFP) — L'Egypte a pressé le pas en signant un accord avec la Russie pour rester en tête de la "famille nucléaire" civile que les pays arabes veulent former face à l'Iran et Israël. Une poignée de main entre le président Hosni Moubarak et le président Vladimir Poutine a conclu mardi à Moscou un accord de coopération nucléaire cadre qui ne manquera pas de préoccuper l'Occident. "Les pays occidentaux peuvent être intrigués et un peu inquiets, même si rien n'est encore scellé sur le plan commercial", a affirmé à l'AFP Antoine Basbous, directeur de l'Observatoire du monde arabe, basé à Paris. Déjà présente en Iran, à qui elle fournit du combustible nucléaire, la Russie a pris de l'avance pour la construction de la première des quatre centrales voulue par l'Egypte, pourtant alliée du camp occidental. "L'Egypte est l'un des leaders du monde islamique et du monde arabe et nos actes communs sur la scène internationale ont un sens spécial", a souligné M. Poutine. Le président Moubarak avait décidé en octobre de relançer un ancien programme monté avec l'URSS dès 1961 et gelé après la catastrophe de Tchernobyl, en Ukraine, en 1986. Un appel d'offres international sera lancé cette année pour le premier réacteur nucléaire, sans doute à Dabaa, sur la côte méditerranénne, d'un coût de 1,5 à 1,8 md USD. L'accord signé à Moscou prévoit que la Russie y participera. C'est une contagion nucléaire qui semble avoir saisi cette région instable, une douzaine de pays arabes, du Golfe à l'Atlantique, ayant subitement déclaré leur ambition d'avoir des centrales nucléaires. "Il s'agit d'un droit pour les Arabes", avait martelé M. Moubarak, il y a juste un an, lors du sommet arabe de Ryad, donnant à penser que le temps était venu de former une "famille nucléaire arabe". Six pays du Golfe, dont l'Arabie saoudite, ainsi que le Yémen, la Jordanie, la Libye, l'Algérie ou le Maroc ont dit opter pour l'atome civil dans un contexte alourdi par la crise rampante du nucléaire iranien. Aucun pays arabe ne figure sur la liste de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) des 31 pays dotés de la technologie nucléaire. C'est la sécurité énergétique, et les besoins croissants en énergie, qui a été mise en avant par ces pays, y compris ceux du Golfe dont le sous-sol est gavé de pétrole. Mais pour M. Basbous, "c'est la volonté de l'Iran d'accélérer son programme douteux qui a poussé les pays arabes à se lancer à leur tour dans la course au nucléaire civil". Le directeur général de l'AIEA, l'Egyptien Mohamed ElBaradei, avait souligné en février que l'agence superviserait les activités nucléaires de tous les pays arabes. "Aussi, je ne vois pas de raison pour quiconque d'être préoccupé", avait estimé le patron de l'AIEA. Alors que les pays occidentaux restent dubitatifs sur les finalités civiles ou militaires du programme iranien, ils n'ont émis aucune réserve sur les ambitions arabes. Si le risque de prolifération nucléaire dans cette région hypersensible est évoqué par les experts de ces pays, les gouvernements semblent enclins à privilégier leurs intérêts commerciaux Les Etats-Unis viennent de signer un premier accord de coopération avec Barhein. La France, leader mondial du nucléaire civil avec Areva, l'avait devancé avec des accords similaires avec l'Algérie, la Libye et les Emirats arabes unis. L'Egypte, qui a ratifié en 1981 le traité de non prolifération nucléaire (TNP), soutient l'élimination des armes nucléaires au Moyen-Orient et critique régulièrement Israël sur cette question. Mais elle refuse de signer un protocole additionnel renforçant encore les pouvoirs d'inspection de l'AIEA. L'Etat hébreu, qui n'a jamais reconnu détenir l'arme nucléaire, aurait en sa possession comme une "assurance vie" quelque 200 ogives, selon les experts, et est le seul Etat du Moyen-Orient à avoir choisi de rester en dehors du TNP.

OBSERVATOIRE DES PAYS ARABES
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