29/12/2008 Texte

pays

<< RETOUR

Israël menace d’une offensive terrestre dans la Bande de Gaza

Quelque 6 500 réservistes de l’Etat hébreu ont été mobilisés hier et des chars ont été déployés à la frontière du territoire palestinien malgré l’appel des Nations unies à « l’arrêt immédiat des violences ». L’appel des Nations unies à l’« arrêt immédiat de toute violence » sera-t-il entendu au Proche-Orient ? Réuni d’urgence hier à la demande de la Libye, seul pays arabe membre, le Conseil de sécurité de l’Onu a invité les parties au conflit israélo-palestinien à « arrêter immédiatement toutes leurs activités militaires ». Mais le texte des quinze membres du conseil de sécurité n’est pas contraignant. Et il ne mentionne nommément ni Israël, qui depuis samedi mène une offensive militaire dans la Bande de Gaza contre les tirs de roquettes du Hamas, ni le mouvement islamiste au pouvoir dans ce territoire palestinien qui multiplie les tirs en direction de l’Etat hébreu pour protester contre le blocus israélien en place depuis juin 2007. Le Conseil a également souligné la nécessité de «ramener complètement le calme afin d’ouvrir la voie à une solution politique aux (...) problèmes existants dans le contexte d’un règlement israélo-palestinien ». Mais ce n’était pas le chemin que semblaient prendre hier les belligérants. Laissant désormais planer la menace d’une offensive terrestre à Gaza, Israël a décidé de mobiliser 6 500 réservistes et massait hier des chars et des troupes à la lisière de la bande de Gaza. Par ailleurs, les raids israéliens se sont poursuivis toute la journée de dimanche : l’aviation israélienne a en particulier bombardé une quarantaine de tunnels de « contrebande » dans le sud de la bande de Gaza pour tenter de stopper l’approvisionnement du Hamas en armes faisant de nouvelles victimes. En fin de journée, le bilan de l’opération « plomb durci » - la plus violente depuis 1967 - s’élevait à près de 300 morts, en majorité des policiers du Hamas, et plus de 600 blessés. En riposte, une vingtaine de roquettes ont été tirées depuis la bande de Gaza dans le sud d’Israël sans faire de victimes. L’une d’elles, de type Grad, a atteint pour la première fois Gan Yavné à plus de trente kilomètres de Gaza. A Sderot, cible habituelle des roquettes palestiniennes, Tzipi Livni, ministre israélienne des Affaires étrangères, a appelé la communauté internationale à soutenir l’offensive israélienne. « Nous ne pouvons accepter que le monde mette sur le même plan une organisation terroriste comme le Hamas qui a pris le contrôle de la bande de Gaza de façon illégitime et un Etat membre des Nations unies » qui exerce son droit à l’autodéfense, a-t-elle déclaré à une soixantaine de représentants étrangers.

Antoine Basbous, directeur de l'Observatoire des Pays Arabes: «Israël a voulu faire passer un message de fermeté à ses voisins»

Etes-vous surpris par une réaction aussi violente de la part d’Israël ? Même si cette réaction était attendue, le nombre très élevé des victimes est une véritable surprise. Mais il faut savoir que l’échec d’Israël face au Hezbollah en 2006 a réduit son pouvoir de dissuasion. Aujourd’hui, on ne craint plus Israël comme avant. Après avoir laissé la responsabilité de la rupture de la trêve au Hamas, les Israéliens ont donc voulu frapper fort pour faire passer un message de fermeté à leurs voisins. Il ne faut pas oublier non plus que nous sommes à neuf semaines des législatives israéliennes : la coalition sortante a voulu montrer qu’elle peut faire du Nétanyahou sans Nétanyahou. Une nouvelle Intifada (1) est-elle envisageable aujourd’hui ? J’ai du mal à penser que c’est possible. Il y a 20 ans, les Israéliens étaient à l’intérieur des villes; aujourd’hui, ils les encerclent. Quant aux Palestiniens, ils sont aussi divisés qu’épuisés. En même temps, ils ont développé de nouvelles formes de riposte, notamment les opérations kamikazes. Comment sortir de la crise ? Il faut d’abord savoir qui peut s’imposer comme l’incarnation de la Palestine. Le Hamas ou le président Abbas, dont le mandat se termine dans deux semaines ? Le deuxième enjeu est irano-arabe. Téhéran veut prendre la tête du monde islamique en instrumentalisant la cause palestinienne, alors que les Arabes lui résistent et ont noué des alliances opposées. Dernier élément important, la position américaine. Cette crise va finir par s’imposer sur l’agenda d’Obama alors qu’elle allait passer après le redémarrage de l’activité économique aux Etats-Unis, l’Afghanistan et l’Irak. Qui peut servir de médiateur dans ce conflit ? C’est difficilement identifiable avec la fin des mandats de Bush aux Etats-Unis et de Sarkozy en Europe. Aujourd’hui, c’est l’opinion publique, via les images que diffusent les télévisions, qui peut pousser les dirigeants, notamment arabes, à tenter de mettre un terme aux hostilités. Recueilli par Philippe Pitaud

L’Europe manifeste

De Londres à Paris, en passant par Madrid, Copenhague ou Rome : plusieurs milliers de personnes ont manifesté hier à travers l’Europe contre les raids israéliens dans la bande de Gaza. Des rassemblements ont aussi eu lieu à Istanbul et dans une dizaine de villes de Turquie. A Paris, dans le quartier populaire de Barbès où vit une importante population d’origine maghrébine, une manifestation a rassemblé quelque 1 300 personnes, selon la police, brandissant des banderoles où l’on pouvait lire « Stop au massacre des innocents ». Parallèlement, entre 150 et 300 personnes se sont rassemblées place de l’Etoile, en haut des Champs-Elysées, en scandant « Israël terroriste, Europe complice », ou encore « Shoah à Gaza ».

OBSERVATOIRE DES PAYS ARABES
twitter   |