29/12/2008 Texte

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ANALYSE - 4 questions autour des raids israéliens sur Gaza

Pour la troisième journée consécutive , l'armée israélienne poursuit lundi une offensive aérienne sans précédent sur la bande de Gaza. D'après un dernier bilan, plus de 310 personnes ont péri, en majorité des policiers du Hamas. On dénombre également plus de 1.420 blessés. Pour tenter de comprendre les raisons de cette nouvelle escalade dans la violence, lepoint.fr a interrogé deux experts : Antoine Sfeir, directeur des Cahiers de l'Orient , et Antoine Basbous, directeur de l'Observatoire des pays arabes. Pourquoi une opération aussi massive de la part d'Israël ? Baptisée "Plomb durci", l'opération militaire lancée samedi par les forces armées israéliennes en réponse aux tirs de roquettes du mouvement islamiste Hamas dans la bande de Gaza est la plus meurtrière sur ce territoire depuis la guerre des Six Jours, en 1967. Si la virulence de cette riposte a pu surprendre, elle était pourtant à prévoir, d'après de nombreux analystes. Les élections législatives du 10 février en Israël approchant à grands pas, le gouvernement veut à tout prix montrer que l'alliance entre le parti Kadima et les travaillistes est capable de protéger les intérêts sécuritaires d'Israël. En embuscade, Benjamin Netanyahou, à la tête du Likoud, qui a axé sa campagne sur une action musclée à Gaza. Autre explication pouvant expliquer la violence de la réplique : "Israël veut rétablir son image dissuasive perdue en 2006 contre le Hezbollah", souligne Antoine Basbous. Quels sont les objectifs poursuivis par Israël ? Officiellement, le dessein de l'armée israélienne Tsahal est sécuritaire : il s'agit à la fois de mettre fin aux tirs de roquettes en direction du sud d'Israël qui se sont accrus depuis début novembre et de faire cesser la contrebande d'armes entre Gaza et l'Égypte. Le Hamas ayant refusé, le 19 décembre, de prolonger la trêve, Israël s'est alors saisi de l'argument sécuritaire pour en faire un thème de campagne en vue des élections législatives. Mais officieusement, il s'agit de porter un coup à la puissance militaire et politique du Hamas. "Israël est engagé dans une guerre sans merci contre le mouvement islamiste Hamas dans la bande de Gaza", a même déclaré lundi le ministre israélien de la Défense Ehoud Barak. Pour Antoine Sfeir, "Israël veut affaiblir le plus possible le Hamas avant les élections en Palestine. De tous les points de vue, Israël avait intérêt à cette escalade". Une intervention terrestre israélienne à Gaza est-elle plausible ? Pour le moment, les attaques sont aériennes - menées avec des F-16 et des drones - mais plusieurs indices laissent présager une attaque terrestre. Le secteur frontalier longeant la bande de Gaza a été décrété lundi "zone militaire fermée" par l'armée israélienne, et le gouvernement a rappelé au moins 6.500 réservistes. Mais Antoine Basbous ne croit pas à un tel scénario : "À mon sens, Israël ne voudra pas réinvestir la bande de Gaza ni s'enliser dans un conflit, mais lancer des attaques ponctuelles coup-de-poing où le risque ne sera pas élevé. Israël peut continuer à infliger de lourds dégâts aux infrastructures palestiniennes et poursuivre ses interventions jusqu'à obtenir une victoire massive." Y a-t-il une issue au conflit ? Sans surprise, le chef du Hezbollah libanais, Hassan Nasrallah, a soutenu l'appel des dirigeants du Hamas pour mener une troisième intifada contre Israël et une reprise des attentats-suicides. Pour sa part, le chef en exil du Hamas, Khaled Mechaal, s'est dit prêt à "conclure une trêve à Gaza si Israël accept[ait] un cessez-le-feu et lev[ait] son blocus de la bande de Gaza". Du côté d'Israël, le Premier ministre Ehoud Olmert prédit des combats "longs, douloureux et difficiles". Pour mettre fin à la dégradation de la situation, une solution diplomatique n'est pas évidente. "Seules les images insoutenables diffusées par la télévision peuvent émouvoir et ainsi pousser les gouvernements arabes à réagir en faisant pression sur les Occidentaux", analyse Antoine Basbous. Pour ce dernier, Israël bénéficie actuellement d'une grande marge de manoeuvre en raison d'un "vide institutionnel" à Washington et en Europe puisque l'administration Obama n'est pas encore en place et que la France s'apprête à rendre la présidence de l'Union européenne, le 31 décembre. De son côté, Antoine Sfeir précise que si Israël poursuit des objectifs uniquement sécuritaires, le problème n'en sera que retardé dans la mesure où une issue politique est nécessaire. "Il est certain que le Hamas a besoin avant tout d'être reconnu. La communauté internationale est prise entre le marteau et l'enclume puisqu'elle a refusé de parler avec le mouvement jusque-là. Or, le Hamas a formé un gouvernement issu des élections législatives de 2005."

OBSERVATOIRE DES PAYS ARABES
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